LA VIE MYSTIQUE DE SAINTE THÉRÈSE DE L'ENFANT-JÉSUS (1)
Ce texte du Père Arintero fut publié en français sous forme d’opuscule par la Propagande du Sacré-Coeur, Lyon, sans date.
Sa version originale en espagnol fut quant à elle publiée à Salamanque (1926), avec Nihil obstat des Pères Alberto Colunga et Sabino M. Lozano, et imprimatur du P. Luis G. Alonso Getino, Prieur provincial. Rappelons, pour mémoire, que la "petite" Thérèse a été béatifiée le 29 avril 1923 et que le P. Arintero est décédé le 20 février 1828.
SAINTETÉ PRÉCOCE ET FIDÉLITÉS AUX INSPIRATIONS DIVINES
Tant de choses, déjà, ont été écrites sur la petite sainte de Lisieux, qu'il semble, vraiment, n'y avoir plus rien à dire. Nous voulons, cependant, la présenter aujourd'hui sous un jour nouveau, en montrant quelle a été dans sa vie l'influence des dons du Saint-Esprit, ce qu'ils y ont opéré et peuvent opérer, aussi, en chacun de nous, puisque la sainteté n'est que l'épanouissement de ces mêmes dons dans l'âme fidèle.
On s'est souvent demandé par quel merveilleux secret cette heureuse créature, Thérèse de l'Enfant-Jésus, était parvenue en si peu de temps à un tel degré de vie parfaite et sainte. Ne le cherchons pas ailleurs que dans sa constante et prompte docilité à répondre à la voix de Jésus comme à tous les mouvements de sa grâce divine, et cela jusque dans les plus petites choses. En d'autres termes, dans sa générosité à correspondre, dès son jeune âge, aux faveurs et aux desseins de ce « Père des miséricordes » qui la prévint avec tant de bonté. Elle-même nous déclare n'avoir rien refusé au Bon Dieu depuis l'âge de trois ans.
D'une telle fidélité découla cette amoureuse et absolue confiance en Dieu qui a fait de sa vie une vie unique, toute dirigée et embrasée par l'Esprit d’amour.
Nous la voyons en effet, dès son enfance, comme toute prise et possédée par ce divin amour, animée d'un ardent désir de la sainteté, avec la confiance, la certitude même d'y parvenir, non par elle-même, mais par la miséricorde de Celui qui - comme le dit le vénérable Louis de Grenade - ne donne ces désirs que pour les réaliser entièrement, si l'on n'y met pas d'obstacle.
Elle veut, dès lors y travailler, non à moitié mais complètement.
Où va-t-elle donc diriger ses efforts ? Sur quel point concentrera-t-elle cette énergie que l'on devine de si belle allure ? Écoutons-la, car c'est ici que se fait le plus vivement sentir l'influence prévenante de l'Esprit de lumière, lui découvrant les secrets du Royaume de Dieu : « Comprenant qu'il m'était impossible de rien faire par moi-même, la tâche me parut simplifiée ».
Parole exquise, d'une étonnante profondeur, écrite plus tard au sujet d'une charge qui lui était confiée, mais qui résume, dès le début, toute sa vie spirituelle, et nous révèle le fond si simple et si vrai de son âme d'enfant, le secret de sa course vers la sainteté.
Toute jeune, en effet, elle a compris son incapacité, son néant, sa faiblesse ; grâce bien rare, croyons-nous, et qu'il faut acheter souvent par une expérience plus ou moins prolongée de sa propre misère. Pour Thérèse, dès le début, elle attendra tout de Dieu, rien d'elle-même. N'est-ce pas parce qu'elle ne peut rien que la tâche lui semble plus facile ? Sa forme de sainteté sera donc de se confier et de s'abandonner au Père qui peut tout et qui la conduit. Elle se contentera de lui être très fidèle.
C'est dire que l'influence des dons du Saint-Esprit éclate merveilleusement en son âme.
Ces dons sont, en effet, des grâces surnaturelles, des habitus qui nous rendent propres à recevoir les divines inspirations et à nous y rendre dociles, qui nous font connaître et sentir la bonté de Dieu et nous poussent à Le chercher avec simplicité de cœur, et grande confiance de le trouver (Sag. 1,1).
La pratique de ces dons constitue la vie contemplative ou, à proprement parler, la vie mystique.
Contrairement à ceux qui supposent chez Thérèse une « âme purement ascétique » s'écartant à peine de la voie que l'on appelle « ordinaire » – celle des commençants, et dont la plupart sont supposés ne pas à sortir – nous disons, non seulement qu'elle fut mystique dans toute la rigueur du mot, mais qu'elle commença à l'être, par grâce spéciale, dès le premier éveil de la raison.
Et nous disons, également, que tous les actes de Thérèse, même les plus ascétiques en apparence, ont une certaine teinte mystique, provenant d'un cœur déjà embrasé d'amour de Dieu. Ainsi, sa confiance filiale et son abandon à l'action divine sont tels qu'elle paraît tout de suite en plein état passif, dirigée par un instinct supérieur, uniquement possédée par l'Esprit-Saint et enseignée par Lui.
Cet instinct et cette emprise la mènent sûrement, bien que parfois dans les ténèbres, par le droit sentier que l'amour lui a tracé et qui est la petite voie.
THÉRÈSE ÉTAIT TOUJOURS PORTÉE PAR L'AMOUR
« La grande confiance en Dieu de Thérèse », lisons-nous dans l'Esprit de la Sainte (Ed. 1924, p. 143), « naissait spontanément de son ardent amour. »
Cette parole, il faut la dire de toutes ses vertus, de tous ses actes de vertu, par conséquent de sa vie ascétique, qui découlait, en effet, de sa véritable union à Dieu, de sa vie d'amour, commencée dès l'âge de trois ans, par une attention continuelle à la présence divine et une vigilante fidélité à l'Esprit-Saint.
Quelques citations montreront, mieux que nous ne saurions le faire, ce qu'était l'amour en Thérèse et ce qu'il y opérait :
« Ma vie est toute d'amour et de confiance en Dieu, écrit-elle ; je ne comprends pas les âmes qui ont peur d'un si tendre ami ».
Et elle encourage, elle excite celles qui lui sont confiées à la croire et à l'imiter : « J'ai compris jusqu'à quel point votre âme est sœur de la mienne, puisqu'elle est appelée à s’élever à Dieu par l'Ascenseur de l'Amour, et non à gravir le rude escalier de la crainte. Oui, depuis qu'il m'a été donné de comprendre l'amour du Cœur de Jésus, j'avoue qu'il a chassé de mon cœur toute crainte. Le souvenir de mes fautes m'humilie, me porte à ne jamais m'appuyer sur ma force qui n'est que faiblesse mais ce souvenir me parle plus encore de miséricorde et d'amour. Comment, lorsqu'on jette ses fautes, avec une confiance toute filiale, dans le brasier dévorant de l'Amour, ne seraient-elles pas consumées sans retour ? »
« Ce qui offense Jésus, ce qui le blesse au cœur, c'est le manque de confiance. »
« Je sens en mon cœur des désirs immenses - lisons-nous dans son Acte d'offrande à l'Amour - et c'est avec confiance, ô mon Dieu, que je vous demande de venir prendre possession de mon âme. » Elle nous explique ce qu'elle entend par cette prise de possession : « Je demande à Jésus de m'attirer dans les flammes de son amour, de m'unir si étroitement à Lui qu'il vive et agisse en moi. Je sens que, plus le feu de l'amour embrasera mon âme, plus je dirai : Attirez-moi, plus aussi les âmes qui s'approcheront de la mienne courront avec vitesse à l'odeur des parfums du Bien-Aimé ».
« Ce n'est pas parce que j'ai été préservée du péché mortel que je m'élève à Dieu par la confiance et l'amour. Ah ! je le sens, quand même j'aurais sur la conscience tous les crimes qui se peuvent commettre, je ne perdrais rien de ma confiance : j'irais, le cœur brisé de repentir, me jeter dans les bras de mon Sauveur. Je sais qu'il chérit l'enfant prodigue, j'ai entendu ses paroles à sainte Madeleine, à la femme adultère, à la Samaritaine. Non, personne ne pourrait m'effrayer ; car je sais à quoi m'en tenir sur son amour et sa miséricorde. Je sais que toute cette multitude d'offenses s'abîmerait, en un clin d'œil, comme une goutte d'eau jetée dans un brasier ardent.
« Il est rapporté dans la Vie des Pères du désert, que l'un d'eux convertit une pécheresse publique dont les désordres scandalisaient une contrée entière. Cette pécheresse, touchée de la grâce, suivait le saint dans le désert pour y accomplir une rigoureuse pénitence, quand, la première nuit du voyage, avant même d'être rendue au lieu de sa retraite, ses liens mortels furent brisés par l'impétuosité de son repentir plein d'amour ; et le solitaire vit au même instant son âme portée par les anges dans le sein de Dieu. Voilà un exemple bien frappant de ce que je voudrais dire, mais ces choses ne peuvent s'exprimer ».
« Jésus ne demande pas de grandes actions, mais seulement l'abandon et la reconnaissance : “Je n'ai nul besoin, dit-il, des boucs de vos troupeaux, parce que toutes les bêtes des forêts m'appartiennent et les milliers d'animaux qui paissent sur les collines ; Je connais tous les oiseaux des montagnes. Si j'avais faim, ce n'est pas à vous que je le dirais ; car la terre et tout ce qu'elle contient, est à moi. Est-ce que je dois manger la chair des taureaux et boire le sang des boucs ? IMMOLEZ À DIEU DES SACRIFICES DE LOUANGES ET D'ACTIONS DE GRÂCES ! » ⇢
ARINTERIANA
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Exposition en langue française de la vie et des œuvres du Père Juan González Arintero (1860-1928), restaurateur de la théologie mystique en Espagne, grand directeur d'âmes et apôtre de l'Amour Miséricordieux.
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Pour moi ferez beaucoup et vous n’y perdrez mie. »
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